En Espagne, l’éventail est roi ! On l’emploie pour supporter la chaleur de l’été, pour danser le flamenco, pour séduire, pour donner une touche glamour à son look…
Voici tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur cet accessoire mythique sans jamais oser le demander :
1 – De quand date la création de l’éventail ?
Il est difficile de dire quand cet objet culte est né… Selon certains spécialistes, il serait utilisé depuis la préhistoire, notamment pour raviver le feu.
D’autres historiens estiment que nos ancêtres avaient pour habitude de se servir d’une feuille de palme, qu’ils agitaient pour se rafraîchir.
2 – Où est-il apparu en premier ?
Là encore, la réponse est loin d’être évidente. En effet, les documents à ce sujet (manuscrits, représentations picturales) ou les modèles les plus anciens ont pu être détruits.
Seule certitude : il a été utilisé dans le monde entier. On retrouve sa trace en Égypte (dans la tombe de Toutankhamon notamment), en Grèce, en Italie, au Japon ou même en Chine.
3 – Les Espagnols ont-ils inventé l’éventail plié ?
Pas du tout ! Il faudra attendre longtemps avant que l’Espagne ne s’empare de cet objet pour en faire un emblème national.
Il semblerait que cette invention date du 7e siècle et vienne… du Japon. En s’inspirant des ailes d’une chauve-souris, un artisan talentueux aurait créé ce modèle, nommé « sensu » ou « ôgi ». À l’époque, il était surtout prisé par les hommes. À tel point qu’au Moyen-Âge, il est devenu un véritable instrument de guerre : les chefs s’en servaient pour guider leurs troupes.
4 – Quand s’est-il transformé en accessoire de mode ?
C’est lorsqu’il est arrivé en Europe, au 16e siècle, que l’éventail est devenu « fashion ». La noblesse et la bourgeoisie raffolent de cet objet raffiné, le plus souvent doté d’ornement luxueux.
Au 18e siècle notamment, les artisans rivalisent d’ingéniosité pour sculpter l’ivoire ou ciseler la nacre, incruster des pierres précieuses ou peindre des scènes mythologiques. Les modèles les plus rares sont créés en France, en Italie ou en Angleterre.
Les femmes s’en emparent pour sublimer leurs toilettes, et développent tout un art du langage grâce à l’éventail. Une tendance qui perdurera en France jusqu’à la Révolution, période à laquelle il devient « has been » dans l’Hexagone.
5 – Pourquoi l’Espagne est-elle une championne de la production d’éventails ?
La love story entre les Espagnols et l’éventail remonte a plusieurs siècles.
D’abord parce que le pays a acquis un formidable savoir-faire dans ce domaine. De nombreux artisans français se sont par exemple installés dans la région de Valence. Dès le 19e siècle, l’albanico gagne donc ces lettres de noblesse. On le fabrique en dentelle, en soie, en bois, en nacre, en ivoire…
Une tradition qui s’est maintenue jusqu’à nos jours. Certains ateliers de la commune d’Aldaya ont plus de 300 ans ! À Valence, la Real Fábrica de Abanicos est notamment devenue une institution et la ville un des plus gros producteurs d’Europe.
Ensuite, l’éventail est chargé d’un imaginaire riche et très valorisant. Il est devenu un symbole culturel à part entière quand il a été associé :
- aux ballets flamenco (en particulier le grand éventail de pericón) ;
- aux intellectuels, et notamment aux incontournables poètes de la Génération de 27 : Rafael Alberti, Federico Garcia Lorca…
6 – Les éventails espagnols sont-ils tous de bonne qualité ?
Les meilleurs éventails se trouvent surtout du côté de Valence et parfois dans certaines boutiques de Madrid. Si vous envisagez d’en acheter un, regardez attentivement l’étiquette pour savoir où il a été fabriqué.
Les modèles les moins chers, qui sont aussi les plus répandus, sont essentiellement conçus en Chine. Ils sont confectionnés dans des matériaux à bas prix, sont peints à la machine et ils se ferment généralement assez mal.
Un éventail typique, fait par des artisans, nécessite du temps, une équipe de passionnés et une réelle expertise. Il est donc proposé à un tarif plus élevé.
7 – Les Espagnols connaissent-ils le langage de l’éventail ?
Le langage secret de l’éventail n’est plus « parlé » aujourd’hui… car il n’a plus d’utilité. Il a surtout inventé pour permettre aux jeunes filles de la cour d’Espagne, très surveillées, de faire passer des messages à leurs soupirants.
Elles avaient ainsi un arsenal d’une trentaine de codes pour communiquer en toute discrétion.
En voici quelques-uns :
- L’éventail placé sur le cœur : « Tu as gagné mon amour » ;
- Le faire tomber : « Je t’appartiens » ;
- Le fermer d’un seul coup : « Je suis jalouse » ;
- Le tenir fermé dans la main gauche : « Je ne suis pas célibataire » ;
- Utiliser un autre objet pour le taper : « J’en ai assez d’attendre » ;
- S’en servir pour se cacher une partie du visage : « Prudence, on nous surveille ».