Mais pourquoi les Espagnols font-ils la sieste ?

À l’étranger, les Espagnols ont la réputation de manger des tapas et de la paella, de danser le flamenco, d’aimer faire la fête… et d’être des inconditionnels de la sieste !

La « siesta » ferait partie intégrante de leur art de vivre, à tel point qu’ils s’y adonneraient tous les jours.

Mais au-delà du cliché, est-ce toujours une réalité dans l’Espagne contemporaine ? Il est temps de tordre le cou à de nombreux mythes encore trop répandus !

sieste espagnols

Idée reçue n° 1 : « La sieste est typique de l’Espagne »

Savez-vous que faire la sieste est excellent pour la santé ? Les spécialistes en neurosciences considèrent même qu’il s’agit d’un « médicament d’avenir » (source).

Il y a donc de nombreux pays qui l’ont mise en place, depuis très longtemps, y compris dans le monde du travail :

  • l’Italie, où « il pisolino » est une tradition qui existe depuis l’Antiquité ;
  • l’Allemagne, où elle est pratiquée au moins 3 fois par semaine (source) ;
  • le Royaume-Uni, où le très sérieux journal The Times a lancé un appel pour réclamer une « sieste nationale » (source) ;
  • la Chine, qui a été jusqu’à inscrire le droit à la sieste dans sa Constitution (source) ;
  • le Japon, où les travailleurs font régulièrement des micro-siestes au bureau (source);
  • etc.

Idée reçue n°2 : « Tous les Espagnols pratiquent la sieste »

Il ne faut pas confondre « pause déjeuner » et « sieste » !

En Espagne, les horaires de travail sont généralement de 9h à 14h (ou 14h30), suivis d’un long break jusqu’à 16h.  Les salariés restent ensuite jusqu’à 19h minimum, parfois plus tard (20 ou 21h).

Mais s’ils ont le temps de se reposer quand le soleil est au plus haut, cela ne signifie pas qu’ils le font…:

  • seulement 33% des Espagnols s’offrent une sieste quotidienne et plus de 1 sur 2 ne la pratiquent pas du tout (source) ;
  • la plupart des commerces des métropoles, comme Madrid ou Barcelone, restent ouverts toute la journée.

Idée reçue n°3 : « Les Espagnols dorment beaucoup »

En raison de leurs horaires décalés, les Espagnols dînent plus tard (en général vers 21h-22h).  Ensuite, même quand ils ne sortent pas avec leurs amis, ils se mettent rarement au lit avant 23h voire 1h du matin.

En effet, les programmes télévisés du  soir, même en semaine, commencent entre 22h et 22h40. Y compris lorsqu’il y a des retransmissions de matchs de football !

En revanche, ils ne sont pas de gros dormeurs : la majorité des Espagnols se lèvent avant 8 heures. Une étude réalisée par Ipsos révèle ainsi qu’ils dorment moins de 7 heures par nuit. Pourtant, les adultes ont besoin de sept à neuf heures de sommeil pour être en pleine forme (source).

Idée reçue n°4 : « À cause de leur « siesta », les Espagnols travaillent moins »

Parce qu’ils ont des horaires différents, on imagine souvent que les Espagnols travaillent moins que leurs homologues européens.

Mais là encore, il s’agit d’un préjugé démenti par les faits. La très sérieuse Organisation de Coopération et de Développement (OCDE) a révélé qu’en 2020, les Espagnols ont travaillé en moyenne 1577 heures (source).

C’est beaucoup plus que les Allemands (1332 heures), qui sont pourtant considérés comme des bourreaux de travail, mais aussi que les Français (1402 heures), les Norvégiens (1369 heures) ou les Anglais (1367 heures)

Cependant, force est de constater qu’ils sont moins productifs. Peut-être en raison de leurs nuits trop courtes ? Par heure travaillée, la contribution au PIB est en moyenne de 52€ pour un Espagnol (source). C’est beaucoup moins que les Irlandais (107€), les Français (70€), les Allemands (66€), les Anglais (59€) et les Italiens (56€).

Idée reçue n°5 : « La sieste est une tradition immuable »

L’art de la siesta espagnole pourrait être amené à disparaître.

D’abord parce que, comme évoqué précédemment, les Espagnols ne sont plus des inconditionnels de ces moments de repos, surtout dans les grandes villes.

Ensuite, cette coutume commence à faire débat. En 2016, l’ancien Premier ministre espagnol, le conservateur Mariano Rajoy, s’est attaqué à la sieste. Son objectif : améliorer la productivité nationale, en adoptant les mêmes horaires de travail que dans le reste de l’Europe.

Il réclamait aussi un changement de fuseau horaire, pour s’aligner à celui de Greenwich (utilisé par Londres et Lisbonne). Car actuellement, le pays de Cervantès fonctionne à l’heure allemande depuis 1942.

Selon Mariano Rajoy, son pays souffre de nombreux problèmes liés aux deux à trois heures de la pause déjeuner. À commencer par des décalages horaires avec ses partenaires économiques.

Aujourd’hui, cette réforme n’est pas encore passée et cette croisade « anti-sieste » n’est plus une priorité. Mais en s’attaquant à cette institution, Mariano Rajoy a ouvert une brèche. D’autres que lui pourraient être tentés de reprendre le flambeau, surtout en période de crise économique.

 

 

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