À la mort du Franco, en 1975, la monarchie a fait son retour en Espagne.
C’est le dictateur lui-même qui a choisi Juan Carlos pour prendre sa suite. Ce roi a ainsi été longtemps considéré comme un véritable héros de la transition démocratique, avant qu’une série de scandales ne viennent ternir la fin de son règne.
La désignation de Juan Carlos n’était pas le fruit du hasard ! Déjà Prince d’Espagne, il est issu, comme toute la famille royale espagnole, d’une branche de la maison de Bourbon. Celle-là même qui était sur le trône en France avant et après la Révolution.
Une monarchie parlementaire
En Espagne, l’actuelle monarchie est parlementaire. Comme au Royaume-Uni, en Suède, aux Pays-Bas ou en Norvège, le roi a donc avant tout un rôle symbolique.
Il incarne l’unité du pays et il est le garant de la continuité des institutions, dont il contrôle le bon fonctionnement. Le roi d’Espagne est aussi le représentant de la nation, notamment à l’étranger.
Mais ses pouvoirs sont uniquement protocolaires. Par exemple, même s’il est officiellement le Chef de l’État, il ne peut prendre aucune décision politique. Dans la péninsule, le pouvoir exécutif appartient au gouvernement, le pouvoir législatif au parlement et le pouvoir judiciaire est indépendant.
Les premières années de règne réussies de Juan Carlos
Lorsque le roi Juan Carlos a pris le pouvoir, il s’est révélé être un brillant stratège. Pourtant, rares étaient ceux qui croyaient en lui. On le surnommait même « Juan Le Bref ».
Mais le jeune monarque a surpris tout le monde en déjouant tous les obstacles. Il a notamment mis en place une transition sans violence, qui inspirera bien des années après l’Afrique du Sud lors de la fin de l’apartheid.
En 1981, sa réputation prend une nouvelle dimension lorsqu’il stoppe une tentative de coup d’État militaire. Le Parlement espagnol avait été pris en otage. Les images de Juan Carlos intervenant à la télévision pour défendre la Constitution, habillé en uniforme de capitaine général des armées, sont restées célèbres.
Les frasques de la famille royale
Parce qu’il a rétabli la démocratie en Espagne, Juan Carlos a été très aimé et particulièrement respecté par le peuple.
C’est pour cela que la réaction des Espagnols a été particulièrement virulente lorsqu’ils ont découvert la face cachée de leur famille royale.
Car celle-ci mène un train de vie ultra-luxueux, malgré la crise économique qui écrase le pays. Pire : elle a même adopté certaines pratiques douteuses, tant du point de vue de la moralité que de la légalité.
Parmi les plus gros scandales qui ont secoué la monarchie, il y a notamment :
- les parties de chasse à l’éléphant de Juan Carlos en Afrique, en pleine cure d’austérité ;
- les fraudes financières et la corruption, dans une affaire impliquant le gendre du roi, mais aussi sa fille ;
- la vie amoureuse intense de Juan Carlos, qui multipliait les conquêtes et aurait mené une double vie avec une aristocrate allemande.
Autant de révélations qui ont fortement ébranlé la Couronne.
L’abdication de Juan Carlos
Le 2 juin 2014, le roi a donc été contraint d’abdiquer, après 39 ans de règne.
Aussitôt, il y a eu de nombreuses manifestations en Espagne pour réclamer la fin de la monarchie. Des milliers de personnes ont exprimé le désir de voir leur pays devenir une République, comme la France.
Ils ont dénoncé le coût élevé de la famille royale, alors qu’elle n’a aucune utilité réelle. À titre d’exemple, en 2020, elle a perçu 550 000 euros, soit 21% de moins qu’à l’époque de Juan Carlos (source). Mais au total, elle coûte 7,9 millions d’euros aux contribuables (source).
Le nouveau roi d’Espagne : Felipe VI
Le 19 juin 2014, le fils de Juan Carlos lui a succédé.
L’actuel roi d’Espagne a tout fait pour réconcilier les Espagnols avec la monarchie. Marié à une journaliste (Letizia Ortiz) et père de deux enfants, il a réduit les dépenses de la famille royale et affiché une volonté de transparence.
Le onzième souverain de la dynastie des Bourbons semble avoir relevé ce défi. En effet, 76,2% des Espagnols considèrent qu’il est un bon roi.
Toutefois, rien n’est encore gagné.
Felipe VI est embarrassé par les dernières révélations sur son père. Juan Carlos, actuellement exilé aux Emirats Arabes Unis, aurait détourné 100 millions de dollars et caché cette fortune en Suisse (source).
Les enquêtes pour corruption et blanchiment ont été classées en mars 2022. Toutefois, la colère des Espagnols n’est pas retombée. La venue en Espagne de l’ancien roi, qui souhaitait notamment rendre visite à son fils, a déclenché de nouvelles manifestations. De plus, l’actuel chef du gouvernement s’est opposé à son séjour au Palais royal de la Zarzuela (source).
Alors que 37 % des Espagnols souhaitent l’abolition de la monarchie dans leur pays, et que certaines provinces réclament leur indépendance (ex. : Catalogne), la situation est donc loin d’être réglée.