Déjà autonome, la Catalogne sera-t-elle un jour indépendante ? Alors que les élections municipales de 2023 approchent à grands pas, cette question est plus que jamais au centre des débats en Espagne.
Mais pour les étrangers, il n’est pas toujours évident de comprendre ce qui motive cette région du nord-est de l’Espagne à se séparer du reste du pays.
Zoom sur les principales revendications des indépendantistes.
L’Espagne est composée de communautés autonomes
En Espagne, il existe 17 communautés autonomes (+ les villes de Ceuta et Melilla) telles que l’Andalousie, la Galice, la communauté de Madrid, la Navarre, le Pays Basque, la Rioja…
Une loi définit la façon dont elles sont organisées, leurs compétences, et leur financement. Ces super collectivités territoriales bénéficient de nombreux pouvoirs :
- elles disposent de leur propre parlement et de leur gouvernement ;
- elles ont leur police ;
- elles gèrent leur politique de santé, leur système éducatif, leurs services sociaux.
La Catalogne, une région riche et prospère
Juste après la Communauté de Madrid, la Catalogne est celle qui a le PIB le plus élevé. Son taux de chômage est inférieur à la moyenne nationale.
Les Catalans, qui constituent 16% de la population du pays, génèrent environ 1/5ème de la richesse nationale. 25% des exportations espagnoles proviennent de Catalogne.
Cette région possède aussi d’importantes infrastructures (port commercial, plusieurs aéroports internationaux) et un tissu économique dynamique (industrie pharmaceutique, grands groupes multinationaux).
Les principales demandes des indépendantistes
La gestion des impôts
Les Catalans pointent du doigt une situation qui leur semble inadmissible. Alors que leur région est puissante et florissante, elle affiche un énorme déficit.
En effet, en appliquant l’actuel système de redistribution espagnol, elle verse plus d’argent qu’elle n’en reçoit de la part du gouvernement.
Ainsi, malgré une dotation record en 2022 (17,2%), elle est encore « perdante » de 1,8% par rapport à son poids économique réel. Et les années d’avant, elle ne percevait que 13,1% du budget (source).
Une situation qui alimente la grogne des nationalistes. Ils souhaiteraient que soit mis en place un dispositif basé sur celui du Pays Basque :
- la Catalogne pourrait prélever la totalité des impôts ( et non seulement la moitié comme c’est le cas actuellement) ;
- puis reverser à Madrid un pourcentage selon les services rendus par l’État dans la région + une contribution à la solidarité avec les régions les plus pauvres.
La préservation de la culture catalane
En Catalogne, le catalan est une langue plus parlée que l’espagnol (le castillan). La région a aussi son propre drapeau et son hymne. Fière de son identité, elle a plus de 1000 ans d’histoire et un véritable patrimoine culturel (notamment dans sa capitale, Barcelone).
Le point de crispation ? Les indépendantistes souhaitent donner plus de visibilité à la langue catalane, ce qui déclenche l’hostilité du reste du pays. Certains redoutent notamment que cela soit préjudiciable à l’unité du pays.
En 2012, une loi a donc imposé l’utilisation de Castillan dans toutes les écoles, y compris en Catalogne. Elle a déclenché la colère des Catalans, qui ont estimé revivre la répression qu’ils avaient déjà subie pendant le franquisme.
Les dates clés du processus d’indépendance de la Catalogne
1932 : Pour lutter contre la monarchie, un mouvement républicain crée la Generalitat, le premier gouvernement catalan.
1977 : Muselée sous Franco, la Generalitat est restaurée.
2005 : Le parlement catalan approuve un projet d’autonomie.
2010 : Le tribunal constitutionnel, basé à Madrid, rejette la reconnaissance de la « nation » catalane et l’augmentation de ses pouvoirs (notamment l’utilisation du catalan dans les médias et l’administration). Pour protester, un million de personnes défilent à Barcelone. À partir de ce moment-là, le mouvement nationaliste catalan prend de l’ampleur.
2017 : Le Parlement catalan adopte une résolution visant à créer une république de Catalogne indépendante.
2022 : Le sondage annuel effectué par la Generalitat montre que la tendance est en train de s’inverser en Catalogne. Désormais, seulement 38% des Catalans se déclarent favorables à l’indépendance (source).
Quelques problèmes à résoudre si la Catalogne devient indépendante
Avec l’indépendance, la Catalogne sortirait de l’Union Européenne. La région deviendrait un pays tiers et devrait alors poser sa candidature pour intégrer à nouveau l’UE.
Cette situation aurait alors des conséquences immédiates (un peu comme lors du Brexit) pénalisant sa compétitivité : application du tarif douanier commun, entreprises qui se relocalisent dans le reste de l’Espagne, baisse significative des investissements directs émanant de l’étranger (actuellement, les 3/4 proviennent de l’UE), sortie de l’euro comme monnaie nationale, etc.
Et pour les passionnés de football, il y a aussi le casse-tête du Barça : comme tous les clubs catalans, il ne pourrait plus participer à la Liga espagnole.